Au Liban, les femmes ne transmettent pas la nationalité à leurs enfants
Par Eléonore
Abou Ez – Geopolis.francetvinfo.fr
Plusieurs pays arabes ont commencé à assouplir leur loi pour permettre aux femmes de transmettre la nationalité à leurs maris étrangers ou leurs enfants. De son côté, le Liban reste à la traîne. La femme libanaise qui épouse un étranger est considérée comme une citoyenne de seconde zone.
«Une
personne est considérée comme libanaise si elle est née de père libanais …».
Voilà ce que dit le texte de loi datant de 1925.
La mère, elle, ne peut transmettre sa nationalité que si ses enfants sont
«illégitimes» autrement dit nés hors mariage ou de père inconnu. Près d’un
siècle plus tard, ce texte archaïque demeure inchangé. La femme libanaise
qui épouse un étranger ne peut pas transmettre la nationalité à son mari ni à
ses enfants.
L’homme libanais a lui en revanche tous les droits.Non seulement il donne la
citoyenneté libanaise à son épouse étrangère mais aussi aux enfants de cette
dernière nés d’une précédente union.
Pourquoi cette discrimination ?
Comme dans tous les pays arabes, cette discrimination est avant tout la
conséquence d’un système patriarcal dominant. «Dans le monde arabe, les
codes du statut personnel sont inspirés de principes religieux , remettre
en question le système de domination patriarcale est donc souvent très
difficile»,souligne au Monde
diplomatique, Claire Beaugrand, chercheuse associée à l’Institut français
du Proche-Orient (IFPO) . Malgré tout,
de nombreux pays comme l'Egypte, l’Algérie ou le Maroc ont assoupli leur
législation ces dix dernières années, permettant ainsi aux femmes de
transmettre la nationalité sous certaines conditions.
La présence palestinienne : un faux prétexte
Pour justifier la situation actuelle, les autorités libanaises ont
souvent évoqué la présence des réfugiés
palestiniens dans le pays. La réforme du code de la nationalité aurait
ainsi pu offrir la nationalité à des Palestiniens et déstabiliser l’équilibre
démographique au Liban. Mais cet argument ne passe pas auprès des ONG qui
rappellent que les restrictions des règles de transmission concernent
uniquement les femmes qui se trouvent privées d’un droit élémentaire.
Des
étrangers dans leur pays
Pendant ce temps, les couples mixtes avec une épouse libanaise doivent se
contenter d’un permis de séjour pour vivre au Liban. Leurs enfants nés dans le
pays sont privés d’un accès gratuit à l’éducation et doivent, à l’âge adulte,
demander un permis de travail, comme le rappelle Amnesty
international. Le mouvement «Ma
nationalité est un droit pour moi et ma famille» milite depuis plus de
dix ans pour modifier le code de la nationalité au nom de l’égalité des droits
entre hommes et femmes.
Mais le statut quo perdure. On constate «un blocage en décalage avec d'autres
avancées dans la société, ou plus avec l'image que le Liban souhaite donner de
lui même ou la perception que les Libanais en ont», précise Claire Beaugrand.